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La proportion de rugbymen formés en France lors des demi finales du top 14

Par Frédéric Bonnet

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La proportion de rugbymen formés en France et jouant régulièrement dans les clubs du Top 14 ne cesse de baisser. Et plus on se rapproche des phases finales plus cette tendance se confirme. Par contre, l’affluence des spectateurs dans les stades du Top 14 augmente… 

Certains disent que la formation des rugbymen en France aurait des défaillances : peut être. Que les éducateurs des écoles de rugby ne seraient pas assez bien formés : certainement. Que la FFR se trompe en ne misant que sur le potentiel physique des jeunes minimes ou cadets au moment des détections territoriales : sûrement. C’est un peu accuser l’enseignant des mauvais résultats de ses élèves, alors que l’on ne lui donne pas les moyens d’enseigner correctement.

Il suffirait donc d’investir, du point de vue financier et pédagogique, les sommes nécessaires à la formation de nos jeunes joueurs pour qu’ils arrivent dans les centres de formation avec un bagage technico-tactique aussi performant que leur développement physique l’est. 

Encore faudrait-il que le rugby professionnel donne une chance à ces joueurs formés en France. Jusqu’à présent les clubs préfèrent recruter, même en cours de saison, des joueurs à l’étranger. Des stars pour attirer des spectateurs et des téléspectateurs, mais aussi des joueurs moyens ou sur le retour (mais expérimentés et bon marché), voire de jeunes espoirs formés à l’étranger, et qui ont, eux, eu la chance de jouer pour leur club avec des séniors grâce à la Curry cup (Afrique du sud) ou à l’ITM (Nouvelle Zélande). 

En France, Baptiste Serin fait figure d’exception. Une exception qui confirme la terrible règle française : la très grande majorité des joueurs espoirs n’auront pas de place en Top 14. Ils devront même batailler ferme pour se faire une place en Pro D2 et dans les championnats fédéraux.

Cette règle fait chaque année deux victimes : les joueurs formés en France et l’équipe de France. Les présidents de clubs pro, et certains de leurs entraineurs, se justifient en proclamant hypocritement, ils ne sont pas si bêtes, que le fait de côtoyer des stars à l’entrainement ou en salle de musculation serait extrêmement bénéfique à nos jeunes joueurs. Comme par magie, le talent d’un Carter ou d’un Nonu se diffuserait dans l’air ambiant et imprégnerait les autres joueurs de l’effectif, jusque dans les tribunes les jours de matchs.

Hérésie pédagogique totale : imaginez une classe d’école primaire française de cours préparatoire (CP). Imaginez son instituteur, qui en début d’année informerait ses petits élèves, et leurs parents, que seuls les meilleurs et les plus performants auraient la chance de travailler, d’apprendre et de s’exercer à la lecture. Certains de ces excellents élèves auraient même étaient « recrutés » dans les écoles voisines. Les élèves en difficulté, ou simplement bons, les observeraient, et de tant à autres pourraient s’amuser à lire quelques syllabes avec l’élite de la classe. Qui peut penser que ces élèves, privés de l’apprentissage de la lecture, apprendraient à lire un jour ? Quels parents accepteraient de telles méthodes pédagogiques absurdes et scandaleuses ?  

C’est pourtant ce qu’années après années, depuis que le rugby professionnel est arrivé en France (il y a 20 ans), endurent la majorité des joueurs formés en France. Il serait peut être temps de tout remettre à plat ce système délétère et injuste et de placer à nouveau les joueurs au centre des préoccupations de la FFR et de la LNR, plutot que de se préoccuper en priorité des intérêts particuliers de certains clubs, de leurs présidents et des télévisions (Canal plus).

Les Ti’Toulousains voyageurs ont récemment calculé le % de minutes accordées aux joueurs français cette année dans le Top 14.

Le Stade Toulousain (66%), l’ASM (62%) et le Stade Français (61%) figurent en pôle position : félicitations.

Cinq autres clubs ont une proportion supérieure à 50% : Castres (59%), Racing (59%), UBB (55%), Brive (54%) et Oyonnax (53%) : très bien, mais peu mieux faire.

Montpellier, sans surprise, ferme la marche (32%), mais ce n’est pas très brillant pour le RCT (40%), Pau (42%), Agen (42%), Grenoble (47%) et La Rochelle (49%) : avertissement, il faut se remettre au travail.

Il existe bien deux visions du rugby actuellement : celle qui donne sa chance aux joueurs formés en France et celle qui les met de coté.

Les demi finales vont encore accentuer ce clivage.

Le Racing a aligné 12 joueurs formés en France sur 23 possibles (7 titulaires et 5 remplaçants ) : soit 52 % des joueurs.

L’ASM a aligné 11 joueurs formés en France sur 23 possibles (8 titulaires et 3 remplaçants) : soit 47 % des joueurs, mais avec un titulaire en plus que le Racing.

Le RCT a aligné 10 joueurs formés en France sur 23 possibles (4 titulaires et 6 remplaçants) : soit 43 % des joueurs, mais seulement quatre titulaires.

Le MHR a aligné 7 joueurs formés en France (3 titulaires et 4 remplaçants) : soit 30 %, et seulement 3 titulaires.

Ce vendredi, le Racing et l’ASM ont donc donné leur chance à des joueurs formés en France (mais ils pourraient faire mieux) ; par contre samedi, la deuxième demi finale verra s’affronter une franchise  composée massivement de sud africains à une sélection mondiale composée de joueurs néozélando-sudafricano-australo-gallo-fidjo-argento-anglo-américano-géorgo-français ! 

Pourquoi pas après tout si les spectateurs et téléspectateurs sont heureux ! Mais qu’en est-il des supporters qui aiment voir jouer leurs petits formés à La Valette, au Mourillon, à La Seyne, au RCT, à Nîmes, au Pic St Loup, à Béziers ou au MHR ? Qu’en est-il des joueurs non sélectionnés, qui seront en tribune ? Qu’en est-il de la priorité donnée soit disant à l’équipe de France de rugby ? Qu’en est-il de l’intérêt éducatif et émancipateur du rugby ?

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Les deux inventeurs du bouclier de Brennus, Pierre de Coubertin et Charles Brennus, se reconnaitraient-ils dans le rugby professionnel ?

A la mémoire de Nounoune, une personne magnifique.

1 Commentaire

  1. Analyse limpide, réaliste et irréfutable, mais hélas les leviers du rugby français d’en haut ne raisonne qu’en terme de budgets qui enflent désespérément au seul service d’une valse d’égos et de joueurs qui glissent vers le culte du vedettariat. Les terroirs de toujours qui ont fourni des légions d’internationaux se meurent dans l’indifférence, l’expansion se fait dans bien des cas artificiellement, avec le seul critère financier. Le rugby d’élite confisque, avec les mêmes arguments, les jeunes pousses aux valeureux clubs formateurs pour les confiner dans une « réserve » stérile dont très peu émergent, poussant ainsi les clubs des divisions inférieures à compenser ce pillage…en faisant eux aussi appel à des joueurs extérieurs, du reste très respectables. Une telle logique nous conduit vers un rugby géré où le moindre risque est interdit, par contre les affrontements bestiaux se multiplient, tout autant que les traumatismes de tous ordres qui vont conduire ce si beau sport vers la négation de ce qui l’a construit: intelligence, esprit collectif, créativité, inspiration, qui permettait à toutes les morphologies de s’exprimer, dans un proche avenir seuls des gladiateurs aux mensurations surréalistes pourront s’affronter à l’intérieur de franchises, le rugby français n’existera plus que dans les mémoires. Seule, une remise en cause totale du dysfonctionnement actuel, pourrait redonner à tous les échelons, les moyens de drainer les gamins vers les écoles de rugby, autoriserait une formation à tous les niveaux tout en la protégeant des excès et des prédations.

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