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Le petit théâtre tragique de l’élection à la présidence de la FFR

Par Frédéric Bonnet

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L’ élection pour la présidence de la FFR, véritable petite pièce tragi-comique, donne une image assez juste de l’état de déliquescence du rugby français en 2016. Il est de plus en plus difficile de défendre notre sport aux yeux des néophytes consternés par les débats de ces derniers semaines.

Des 4 piliers fondateurs du Rugby de Thomas Arnold, l‘amateurisme a disparu il y a 20 ans, le respect des autres et des règles n’est plus qu’une idée vide de sens et la solidarité collective entre équipiers est de moins en moins une nécessité rugbystique. Seul subsiste, mais comme dans beaucoup d’autres  sports, le courage de combattre un adversaire.

Le rugby français claudique donc désormais sur une jambe. Il finira par tomber. Qui le relèvera ? Un héros salvateur peut être !

Avant de trouver ce héros, il faut caractériser les personnages de la tragédie grecque nommée « Election à la présidence de la FFR ». Car, on a beau dire qu’une élection présidentielle, c’est l’alliance d’un programme, d’un candidat et d’une équipe pour l’entourer, les spectateurs n’ont d’yeux que pour leur CANDIDAT.

Le scénario qui se jouera samedi prochain tient plus du classique que de la nouvelle vague.

Unité de l’intrigue : la prise de la FFR par 3 candidats. Unité de lieu : l’Ovalie. Unité de temps : 24 heures ce samedi 3 décembre 2016.

D’ailleurs, les rôles des trois belligérants ont déjà été joués 1000 fois.

Dans la tragédie classique, il y a rarement un « méchant » absolu. Quand la force divine (le pouvoir de l’argent) qui s’oppose au héros s’incarne dans un personnage, il est malheureux, torturé et ne parvient pas, contre toute apparence, à tirer un réel profit personnel de la puissance qu’il détient (à moins qu’il ne s’agisse du Diable lui-même). Pour le rugby français, finalement le méchant, c’est la LNR et le professionnalisme.

Dans la tragédie classique, l’intrigue se situe généralement dans l’élite de la société. C’est la cas en rugby, sport aristocratique par excellence. Les personnages sont des Rois, des Princes, des Notables ou des Chevaliers.

Ce choix permet au public de prendre ses distances par rapport à l’histoire qui se déroule un peu comme dans un rêve, dans un monde imaginaire, le Marcoussis Land. C’est le cas des rugbyphiles, qui dans leur très grande majorité des cas ne voteront pas samedi, loin, très loin de la catharsis qui nous attend ce samedi 3 décembre.

Pour qui aime Shakespeare ou Racine, la fin de la pièce s’annonce au mieux croustillante, au pire explosive : une mêlée générale où le fair play cher à nos grands frères anglos-saxons sera absent. La tension monte depuis la rentrée et tous les coups bas sont permis. 

Le rugby français est encore bien trop immature pour assumer un débat contradictoire. 

A Marcoussis, le château de notre Ovalie, la distribution sera la suivante :

  • Pierre Camou : il aura le rôle du père, du roi, de la force tranquille, du tenant de la tradition et des valeurs, de celui qui a régné seul pendant si longtemps, de celui qui représente l’establishment et l’échec du rugby français. Il est rassurant, mais il n’est pas moderne.
  • Bernard Laporte : il aura le rôle de celui qui conteste le pouvoir du roi en usant de sa faconde et de son aura, un notable, il est le tenant de la rébellion et il ratisse le plus large possible pour détrôner le roi. Il peut dire tout après avoir fait son contraire. Il profite de la détresse du peuple, mais a le vent en poupe. Il est moderne, mais il fait peur à beaucoup.
  • Alain Doucet : il aura le rôle du traitre, c’est le fils, l’héritier, le prince qui tue le père, qui veut s’émanciper d’une paternité trop écrasante et qui espère que les deux premiers rôles vont s’entretuer. Il a tant travaillé dans l’ombre sans recueillir la reconnaissance si méritée. Il est compétent, mais son heure est-elle venue?

Je ne sais pas si les grands électeurs du rugby français sont amateurs de tragédie grecque. Je suis pourtant certain que beaucoup cherchent honnêtement le héros qui sauvera leur rugby français.

Ils devront choisir entre le Roi, le Notable et le Prince. Quitte à se brouiller sans espoir de réconciliation. Une terrible fracture amicale.

La tragédie nous démontre qu’invariablement le pouvoir et l’argent gagnent toutes les batailles. Dans ce cas, l’élection de ce week end n’aura que peu d’intérêt.

Toutefois, elle nous laisse un espoir absolu, bien qu’exceptionnel : c’est l’amour et l’honneur qui gagnent de temps à autre la guerre.

La question cette semaine est donc : Si par hasard la LNR ne gagne pas samedi 3 décembre, qui représente le mieux l’amour et l’honneur dans le rugby français ? 

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