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La Fédérale 1 de rugby : interdite aux clubs qui ont moins d’un million d’euros de budget prévisionnel

Par Frédéric Bonnet

La fédérale 1 2019-2020, c’est début juillet presque 900 mouvement de joueurs, dont plus de 500 arrivées en club. Quelle proportion de ces joueurs viennent pour trouver un boulot extra sportif, suivre une formation ou préparer leur reconversion ? Combien négocient des contrats fédéraux et des à côtés financiers juteux ? Combien de pros au chomage trouvent une occasion de se caser puisqu’ils bénéficient de la licence A ? Combien de clubs cassent leur tirelire et risquent de le payer au printemps quand la DNACG viendra leur demander des comptes ?

Préambule

Difficile de survivre durablement en fédérale 1 sans avoir un budget de plus de 1 million d’euros.

Parole d’un joueur d’un club de fédérale 1 au budget proche du budget médian de la Pro D2 : «Le week end quand on joue un match contre les autres clubs de la poule, on est décontracté. La semaine par contre, quand on joue entre nous, c’est bien plus intense ! »

Constat dépourvu de toute trace de mépris ou de condescendance, qui souligne l’immense fossé qui sépare le monde professionnel, du monde semi-amateur.

Réformes après réformes, la fédérale 1 demeure une compétition hybride du point de vu sportif, financier et structurel. Certes, la poule élite de fédérale 1 poussait les clubs dans une impasse financière mortifère et la volonté fédérale de mettre de l’ordre dans les dérives des clubs était nécessaire et louable.

Mais cette saison encore, le championnat de fédérale 1 a manqué terriblement de cohérence et de stabilité.

Un problème d ‘ordre sportif, la poule 1 de la fédérale 1

Cette saison, les trois clubs girondins qui jouaient en fédérale 1, le R C Bassin d’Arcachon, le Saint Médard RC et Langon appartenaient à la poule 1. Une poule qui rassemblait trois mondes que tout, ou presque, opposait.

D’un point de vue financier d’abord (en fonction du budget prévisionnel), structurel ensuite (infrastructures du stade, méthodes d’entrainement et de préparation physique) et in fine sportif. On pouvait d’ailleurs grosso modo prédire le classement final de la poule en fonction de trois grandes catégories :

Catégorie I Les clubs quasi professionnels 

Trois clubs, Rouen, Dax et l’Union Cognac Saint Jean d’Angély possédaient soit un budget très supérieur au million d’euros, soit des structures et des méthodes d’entrainement ou de préparation physique proches du monde du rugby pro.

Ils postulaient logiquement à une accession en Pro D2 à très court ou moyen terme. Rouen (1er_102 pts), au budget proche des standards moyens de la Pro D2, Dax (2°-81 pts), qui descendait de Pro D2 et Cognac Saint Jean d’Angély (3°-80pts) ont fini avec seize points d’avance sur le quatrième. Ils ont écrasé la concurrence dans un mini championnat fermé.

Catégorie II L’entre deux

Les budgets prévisionnels de ces clubs tournaient autour du million d’euros. Rennes (5°-61 pts), Nantes (6°-59 pts) et Niort (7°-57 pts) sont des clubs qui sont en cours de structuration. Mais ils proposent à leurs joueurs des conditions d’entrainement et de préparation physique quasi professionnelles.

Ces clubs ont prétendu logiquement tout au long de la saison à une qualification pour le trophée bis dit Jean Prat. Un trophée honorifique mais qui n’est pas qualificatif pour le monde pro.

Catégorie III Les clubs réellement semi-amateurs 

Le reste de la troupe était caractérisé par un budget prévisionnelqui  tournait autour de 600 000 à 800 000 euros. Le RCBA (8°- 48 pts), Bergerac (9°- 44 pts), Suresnes (10°- 44 pts), Langon (11°- 36 pts) et le SMRC (12°-9 pts) se sont battus toute l’année pour ne pas descendre.

Seul Trélissac (4°-64 pts) s’est extirpé de sa condition financière et a poursuivi sa magnifique saison 2017-2018 en parvenant à se hisser à la quatrième place de la poule.

Sportivement, il est évident que les clubs de la première catégorie ont été tirés vers le bas. Les clubs semi amateurs n’avaient que leur courage et leur fierté à leur opposer. Par ailleurs, à l’heure où le rugby prend enfin conscience des risques sanitaires que le professionnalisme fait courir à ses joueurs, opposer des joueurs rapides, lourds et endurants à dessemi-amateurs qui leur rendent en moyenne 10 kg dans chaque ligne et qui ne s’entrainent que trois fois par semaine de 19 heures à 22 heures pose évidemment problème.

Un problème d’ordre financier

On retrouve dans le rugby semi-amateur et amateur les mêmes défauts que dans le rugby professionnel ; mais à une échelle moindre en valeur absolue. Tel un château de carte qui s’effondrerait progressivement, les excès du professionnalisme et de la financiarisation du rugby rejaillissent sur le monde amateur. 

D’une part parce que par effet de mimétisme, le monde amateur singe le TOP 14 (sans en avoir les moyens). D’autre part parce que l’inflation des salaires tire vers le haut les prétentions pécuniaires des joueurs jusqu’en fédérale 3.

Il n’est ainsi plus exceptionnel de croiser des joueurs de rugby toucher plus de 2000 euros par mois en fédérale 1 et plus de 1000 euros en fédérale 2 ; sans parler des primes de matchs ou d’assiduité aux entrainements.

Les salaires et différents avantages financiers sont souvent non déclarés. Certaines recettes (buvette…) sont minorées pour permettre une rémunération occulte. Surtout les gestionnaires des clubs amateurs sont en général dépassés par la complexité de la gestion d’un club de Rugby.

Ces trésoriers souvent bénévoles sont, soit inconscients de l’importance de la tenue de comptes précis par méconnaissance ou simple manque d’intérêt de la réglementation fiscale, soit subissent les errements de présidents inconséquents et peut être trop orgueilleux.

Combien de clubs s’acquittent scrupuleusement de la TVA sur leurs ventes, sur leur billetterie et sur leurs factures de sponsoring ? Les budgets prévisionnels de nombreux clubs de fédérale sont construits sur la base de promesses de sponsors et partenaires qui ne reposent souvent que sur leur parole.

Les soucis de trésorerie sont fréquents quand au sortir de l’hiver certains mécènes, peu fiables, minorent leurs dons, voire les coupent. Pour ne rien arranger, ces problèmes budgétaires sont aggravés par le décalage (d’en général six à huit mois) entre le fonctionnement d’une association sportive et le versement effectif des subventions départementales, communales et régionales. 

Au moment d’aborder le printemps, beaucoup de dirigeants se retrouvent donc à parer au plus pressé pour tenir leur budget au 30 juin : 

rajouter de leur argent personnel pour payer les derniers déplacements (trains, bus, essence) ou les derniers repas des joueurs, sans parler des primes de match, des salaires et des autres frais classiques de la vie d’un club. 

– réclamer des subsides aux sponsors qui s’étaient engagés, repartir à la chasse de nouveaux partenaires ou quémander une rallonge aux collectivités territoriales.

Le cas girondin est emblématique. La saison prochaine, le département ne sera représenté en fédérale 1 que par un seul club, le R C Bassin d’Arcachon. Pour espérer bien figurer et accéder à la 6° place qualificative, le club devra franchir un palier structurel et budgétaire pour être compétitif.

Le Saint Médard RC et Langon espèrent pour leur part se refaire une santé sportive et financière en fédérale 2. Ils pourraient se retrouver dans la même poule que Salles, Floirac, Lormont et le promu Gujan Mestras. Des derbys qui pourraient s’avérer passionnant du point de vue sportif et financier, si les tribunes sont pleines. Mais ces six clubs pourraient tout aussi bien se retrouver dispatchés dans deux poules distinctes avec les Landes et le Pays Basque d’un côté et la Charente, la Charente maritime et le Périgord de l’autre.

Dans tous les cas, la période du marché des joueurs dits semi-amateurs et amateurs s’est ouverte voilà quelques semaines. Quels clubs miseront avant tout sur leur formation ? Ceux qui ne peuvent pas faire autrement.

5 Commentaires

  1. idem pour le championnat élite filles, dominé par ST et Montpellier qui se disputent le titre, quant aux autres équipes , même problématique. Par exemple Villelongue 3 forfaits dans la saison, le petit poucet n’a pas survécu faute de moyens financiers et autres

  2. Constat amer mais tristement vrai !!ainsi va le Monde….que faire?
    – après lecture de multiples chroniques, peu ou pas de propositions pour parer à ces dérives….des assises du rugby ? Un débat, une analyse et des décisions collectives ….
    Un projet constructif pour l’avenir de notre rugby ? !!!!

  3. Bonjour attention le jean prat est le titre de champion de France contrairement aux challenge yves du manoir et par conséquent n est pas un titre honorifique

  4. C’est très intéressant ! je suis particulièrement sensible à la partie « santé » ! C’est une absurdité totale de laisser des pros jouer contre des quasi-amateurs… c’est un simple problème de catégorie qui a des conséquences pathologiques !

  5. Bonsoir,
    votre article écrit lors de la saison 2018/2019 constitue une excellente analyse de la situation des clubs de « PRO D3 »., y compris pour la saison en 2019/2020 en cours..
    Effectivement, le droit d’entrée pour figurer en bonne place et de façon pérenne dans le championnat de Fédérale 1 , est particulièrement élevé,. Sur le plan organisationnel et surtout financier, ce droit d’entrée est la plupart du temps, hors de portée des clubs issus de Fédérale 2..
    Les clubs « grenouilles » qui veulent se faire aussi gros que les clubs « boeufs » existent plus que l’on ne croit, car ils sont,malheureusement dirigés par des présidents inconséquents et sans doute trop orgueilleux., et dont le management « erratique », peut mettre en péril l’existence même de leur club.

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